Divergences culturelles
13 août – 13 février : voilà déjà six mois que je suis arrivé en Norvège ! Comme dirait ce bon vieux Lamartine, grand romantique devant l’éternel, « le temps m’échappe et fuit »... Il est loin le temps des baignades dans le fjord d’Oslo ! Enfin bon, six mois ça passe vite certes, mais c’est quand même suffisant pour dresser un petit bilan des qualités/défauts de nos amis norvégiens. Revue de détail.
J’aime
- Leur patriotisme : j’en ai déjà parlé à plusieurs reprises, et c’est à mon avis l’aspect le plus frappant chez eux. Pas de nationalisme déplacé, mais une grande fierté d’appartenir à une nation « à part », refusant farouchement l’entrée dans l’Union Européenne et préservant ses us et coutumes. Bref, une mentalité presque insulaire, à l’anglaise, mais l’arrogance et le pudding en moins.
- Leur calme : en six mois, je n’ai pas entendu plus de deux coups de klaxon dans les rues d’Oslo... Le Norvégien est un animal à sang froid, et franchement c’est très reposant. Peu de bruit dans les rues, pas un mot plus haut que l’autre, bref, « Cold people for a cold country» comme me l’avait dit une de nos colocataires norvégiennes. Les Norvégiens peuvent cependant perdre entièrement leur flegme, et passer du doux renard polaire au féroce viking, dans quelques situations bien précises :
+ l’équipe de ski de fond norvégienne est en passe de remporter la course de relais 4x10km.
+ vous venez d’ouvrir un peu trop fort un paquet de biscuits en « silent zone » à la bibliothèque
+ c’est vendredi soir et les bars viennent de fermer
+ lors d’un quizz, qui ici n’est pas considéré comme un jeu mais bien comme un sport national.
- Leur politesse (hors contexte professionnel) : un Norvégien n’ira pas spontanément vers les gens, car ça n’est pas dans sa nature, mais il est toujours disponible quand on lui demande quelque chose. Très pratique si vous voulez par exemple vous rendre à la station de bus Høyskolesenteret et que vous ne savez ni où c’est, ni comment prononcer ce nom barbare. Autre élément de courtoisie plutôt appréciable : le passage clouté sert vraiment à quelque chose (on en avait perdu l’habitude).
- Leur respect des horaires : « avant l’heure, c’est pas l’heure, et après l’heure, c’est plus l’heure ». Un cours prévu à 8h démarrera à l’heure dite et pas à 8h05. Il est vraiment mal vu d’arriver en retard en cours, c’est pourquoi les français s’adaptent.
Je n’aime pas
- Leur façon de résoudre les conflits. Les Norvégiens font très rarement sentir à quelqu’un qu’ils sont en désaccord avec lui, même s’ils n’en pensent pas moins. S’ils vous reprochent quelque chose, c’est donc qu’ils sont extrêmement en colère. Bon à savoir…
- Leurs discussions stériles. Les Norvégiens ne parlent pas souvent, mais ils peuvent par contre discuter de tout, et surtout de ce qui ne sert à rien. En classe, il n’est pas rare que les professeurs demandent aux élèves de « discuter entre eux » de tel ou tel sujet, discussion qui s’éternisera pendant des plombes et ne débouchera en général sur aucun résultat concret… Dans le monde du travail, leur conception de la hiérarchie est assez spéciale : tout le monde doit pouvoir donner son avis, du directeur au simple exécutant. C’est évidemment très louable, mais l’efficacité s’en ressent fortement car personne n’ose trancher et prendre une décision.
- Leur respect des règles jusqu’à l’absurde : comme beaucoup de peuples du Nord, les Norvégiens sont très à cheval sur les règlements. Ca a évidemment ses bons côtés (pas de gruge dans les files d’attente, pas d’arnaque sur les prix, pas de fraude dans les transports) mais le revers de la médaille, c’est qu’il est attendu de vous un type de comportement « standard » même quand la situation ne l’exige pas. Ainsi, il n’est pas bien vu, entre autres petites choses :
- de traverser au feu rouge alors qu’il n’y a personne
- de ne pas prendre de ticket d’attente à l’office du tourisme alors qu’il n’y a personne devant vous
- de laisser une paire de skis dans le couloir de votre résidence, car ça pourrait obstruer les accès anti-incendie
J’en passe et des meilleures…
- Leur sens de la relation client. Il est absolument nul, du moins de mon point de vue. 90% du temps, on a l’impression de déranger les commerçants et les restaurateurs, ce qui est quand même un comble en tant que client. Ca ne semble pas typiquement norvégien, car nous avons ressenti la même chose en Suède et au Danemark. Je sais bien que nous sommes des touristes, et donc à ce titre des pauvres, mais ça ne justifie pas tout… On est en tout cas loin du service de tradition française où, comme le disait très justement Louis de Funès à ses serveurs dans « Le Grand Restaurant » (excellent film que je vous engage à redécouvrir) : « N’oubliez pas qu’ici vous êtes dans la cuisine, et qu’au-delà de cette porte c’est la salle, et dans la salle il faut servir, et servir c’est sourire, car le sourire, c’est notre pourboire au client ! »
Bref, résultat du match Norvège-France : 4 partout, balle au centre !